Comment avancer de manière ambitieuse mais pragmatique dans le maquis foisonnant et parfois vertigineux des nouvelles technologies ?
Les penseurs navals français du XXème siècle (Daveluy, Castex, Barjot, Labouérie, Lacoste, Coutau-Bégarie) ont proposé plusieurs réponses à ce défi qui dépasse en fait largement les seuls domaines militaire ou naval.
Grâce à eux, nous comprenons que la technologie confère la supériorité au combat lorsqu’elle se conforme à plusieurs principes atemporels qui la purifient de ses travers pour l’adapter aux exigences du combat et de la mer. Il s’agit de concilier la haute technologie avec la simplicité et la robustesse, la synergie avec l’autonomie, et la différenciation avec l’homogénéité, tout en préférant le solide au brillant et la connaissance au savoir, en nous gardant de tout excès de confiance et de tout perfectionnisme abusif.
L’enjeu consiste au fond à réconcilier la technologie et la stratégie pour éviter les écueils du mécanisme de précision qui ignore la friction, du virtuel qui ignore le réel et de la mode qui oublie la finalité de l’action militaire.
L’innovation est absolument indispensable, mais elle ne doit répondre ni à une fascination béate pour la haute technologie, ni au rejet passéiste de celle-ci ; elle doit résulter d’une démarche prudente et agile qui recherche l’équilibre sur la voie d’une stratégie ambitieuse construite à la lumière de l’histoire et de l’expérience.
Innovation et stratégie navale
François-Olivier CORMAN
Officier de marine, diplômé de l’École navale et de l’École de guerre, il a commandé deux navires de la Marine nationale.